Cet été encore, le patron du label Heavenly Sweetness nous écrit pour partager les trésors de sa discothèque. À lire et écouter sans modération. Aujourd’hui, quelques trésors réunionnais.
Bonjour à tous, après l’Afrique et les Antilles, il est grand temps d’aller faire un tour dans l’océan indien, sur une île au riche héritage musical : La Réunion.
Danyèl Waro — Gafourn (Piros – 1987)
Le premier album d’un chanteur militant, fer de lance du renouveau du maloya, rythme et chant créole de La Réunion qui a été longtemps interdit sur l’île et qui a faillit disparaitre. On parle pour cette musique de blues de l’océan indien, et c’est très juste car cet album vous prend directement aux tripes. La voix de Danyèl Waro dialogue avec des chœurs mixtes sur un tapis de percussions. Le résultat est à la fois profond et percutant et permettra à Danyèl Waro de faire (re)découvrir la musique traditionnelle de La Réunion en métropole mais aussi à l’international. Les paroles de ce premier album ont été en partie écrites en détention car Waro a refusé de faire son service militaire et a donc passé 22 mois en prison, renforçant ainsi son militantisme. On peut faire un parallèle entre le maloya et un autre rythme créole, lui aussi militant et ancestral : le gwoka de Guadeloupe.
Soul Sega Sa ! Indian Ocean Segas From 70s (Bongo Joe – 2016)
Le regain d’intérêt pour les musiques créoles qu’elles viennent des caraïbes ou de l’océan indien a entraîné la publication de plusieurs compilations fort intéressantes. Pour la Réunion , il y en a deux qui sont sorties simultanément en 2016, Oté Maloya faite par La Basse Tropicale chez les amis de Strut, et cette compilation sortie chez les autres amis suisses de Bongo Joe. J’ai choisi cette compilation plutôt que la première car elle contient un de mes titres maloya préférés, l’excellent « Maloya Ton Tisane » de Michou. Morceau que m’a fait découvrir Blundetto il y a des années et que j’ai eu la chance de trouver en 45 tours dans la foulée. L’intérêt de ces compilations est qu’elles regroupent justement des titres uniquement sortis en 45 tours, parfois difficiles à trouver.
À noter que cette compilation présente les deux rythmes phares de La Réunion : le séga et le maloya.
Ti Fock — Mafate (102 production – 1985)
L’avantage quand on est passionné de vinyles, c’est qu’on rencontre souvent d’autres collectionneurs tout aussi mordus avec qui on partage coup de cœur et découvertes. C’est Karl Hungus, DJ et Digger habitant La Réunion, qui m’a fait découvrir ce disque il y a quelques années. Avant que son prix n’explose comme beaucoup d’autres vinyles en provenance des « tropiques ».
Les îles de l’océan indien ont toujours été un lieu d’échange et de fusion des cultures en provenance d’Afrique, du Moyen-Orient ou d’Asie. Il en va de même pour la musique et le musicien Ti Fock a voulu moderniser le maloya en lui incorporant des éléments électroniques, rock et même reggae. Sur cet album, c’est un groupe de onze musiciens qui présente une version digitale et ultra dansante du maloya, faisant écho à la modernisation de la musique africaine par Touré Kunda ou Sunny Ade. Jetez une oreille à l’entrainant « Lo dé ».
Si vous voulez en savoir plus sur Alain Peters, je vous recommande l’excellent portrait realisé par David Commeillas pour Arte Radio. Retrouvez toute la musique de Franck Descollonges dans nos playlists sur Deezer et Spotify.
Cette semaine, les invités sont les « petits nouveaux », la nouvelle signature de Heavenly Sweetness : Bonbon Vodou. Il s’agit d’un duo composé de Oriane Lacaille (fille de René Lacaille, légende de la musique réunionnaise) et le chanteur JereM. Ils jouent une musique entre chanson et musique créole des plus rafraîchissantes. Oriane nous parle de Alain Peters, immense musicien dont je voulais aussi vous parler mais en bon gentleman, je lui ai donné la priorité 😉
Alain Péters – Mangé Pou Le Cœur (Village titan – 1985)
Alain Peters est une figure majeure de la musique réunionnaise. Ces chansons sont un subtil mélange de poésie et d’espièglerie créoles, de belles mélodies entêtantes et de rythmes si particuliers du séga et du maloya. Il y a dans sa musique une intimité et une universalité mêlées qui me touche profondément depuis que je suis enfant. J’aime la mélancolie qui traverse son œuvre, c’est pourquoi je choisi de vous faire écouter « Mangé Pou Le Coeur » qui est une belle représentation de tout ce que je viens de décrire ici.